LOGORRHÉE - Aristophane Firmin Boulon

Décembre 1993

LOGORRHÉE

ARISTOPHANE

 

Firmin Aristophane, ou l’intégrité par Dominique Hérody

Après deux années d’études aux Beaux-Arts de Paris, c’est en 1990 que Firmin Aristophane Boulon se rendit à Angoulême afin de confronter son approche de la bande dessinée dans le cadre de l’atelier spécialisé de l’École régionale des beaux-arts (aujourd’hui l’ÉESI).

Extrait :

Lors de son entretien devant le jury d’entrée, il présenta Logorrhée, dessiné entre 1988 et 1989, qui parut aux éditions Le Lézard en 1993, et dont le propos, manié avec une gravité légère et une allègre liberté de ton, est fondé sur le papotage entre deux filles gracieuses, parfois rejointes par un lion fumant la pipe, qui se posent des questions leur passant comme ça par la tête (ou par les hasards de l’improvisation du dessin), des futilités, peut-être, mais qui n’en sont pas moins de piquants dialogues philosophiques.

Très grand et mince, avec des mains aux doigts infinis et recourbés qu’on attribue volontiers aux pianistes de jazz, terriblement myope, Firmin parlait avec beaucoup de mesure, sans jamais hausser le ton mais avec une conviction impressionnante.

L’essentiel de l’œuvre d’Aristophane publiée se tient en très peu d’années où parut un livre pour enfants chez Casterman, Tu rêves Lili (1993), qui lui laissa un goût amer après que l’éditeur décida que son texte serait réécrit ; il collabora aux revues Le LézardLapin et Le Cheval sans tête (Samson Crow, une histoire inachevée aux allures de blues située dans le Deep South américain), au collectif des éditions Autrement Avoir 20 ans en l’An 2000, avant de doucement s’éclipser. Il quitta la rue Lafayette à Paris où il vivait dans un minuscule studio au rez-de-chaussée en forme de couloir, dessinant sur un chevalet avec un pinceau, pour un village du Poitou, avec à l’esprit un désir d’autonomie dans son travail – voire d’autarcie –, en particulier vis-à-vis des éditeurs, et d’ascétisme dans son mode de vie. C’est dans cette maison qu’un accident domestique le brûla cruellement au visage et aux mains. Il s’était converti à l’hindouisme (quelques récits parus dans Jade jusqu’en 1998 laissent transparaître cette évolution mystique), et il renia alors radicalement Conte démoniaque et Faune, par trop blasphématoires.

 

Né le 8 janvier 1967 en Guadeloupe, Aristophane est mort subitement le 11 mai 2004, à 37 ans.

Dominique Hérody

(Texte écrit en mai 2004, révisé en mars 2020.)

18,00 €

Livraison par Chronopost en France métropolitaine

Autres numéros disponibles

Voir plus de numéros